Cleared for take-off runway 34...

Du Français à l'anglais...

La voix de la femme résonne dans nos casques:

"F-RK, line up and cleared for take-off runway 34."

Je mets doucement les gaz, et l'avion pénètre sur la piste. Le pied droit appuie sur le palonnier et l'avion se met doucement à tourner. J'ai le 34 devant moi et la "centerline" sous les fesses.La piste s'offre à moi.




Le temps est brumeux, ce matin la neige était de la partie, et le plafond bas annonçait une journée maussade. Il reste ci et là des résidus de neige des jours précédents. Le temps est froid et notre moteur de 160CV à bien du mal à se réchauffer.

Je règle le compas et vérifie que tout est bien en ordre. J'enfonce la manette des gaz et l'aiguille des RPM accélère vers 2500 tr/min. Le paysage défile, j'annonce "badin actif, pas d'alarmes" et déjà 100km/h, je tire sur le manche et les roues quittent le sol. L'avion transperce le froid toulousain.

Aujourd'hui, on a prévu d'aller sur Auch, en transitant au dessus de Blagnac (LFBO). Pas le temps de chômer, il faut travailler vite et bien.

"F-RK, over DN to leave the frequency"

La femme du contrôle nous autorise à libérer la fréquence, je lance un rapide "merci, aurevoir" et passe directement avec le Service d'Information en Vol de Toulouse (SIV).
Entre temps j'ai perdu ma langue Anglaise et revient au bon vieux Français.

Le temps et brumeux et le soleil ne parvient pas à transpercer l'épais plafond qui pèse au dessus de nos têtes. Au milieu de la brume on distingue le point E.
Le SIV nous rappelle, nous demande de passer avec la tour de Toulouse et nous assigne un code transpondeur.
La fréquence 118.100 passe du cadran "STBY" au cadran de la fréquence active.
On se reporte vertical E et le contrôleur nous autorise au transit et nous demande de reporter vertical EB.

Les axes de Blagnac se profilent au loin, et on peut entendre dans le casque la voix des pilotes de ligne. On arrive EB et je rappelle le contrôleur qui m'autorise à croiser les axes de la 32L et de la 32R, au nez et à la barbe d'un liner de chez Easy Jet.





"Easy XXX, trafic information, VFR aircraft over the field from right to left, report in sight. "

On croise les axes tranquillement, et l'Easy Jet est autorisé à décoller depuis la 32R.
Blagnac s'éloigne et le contrôleur nous autorise à quitter la fréquence après le point WA, qui signe la fin du transit.

Les nerfs se décrispent et le cœur ralentit. Le moteur tourne rond et les paramètres sont dans le vert.

"If something must go wrong, It will."


Installé paisiblement à 2500ft QNH, je contrôle mon cap et ma vitesse et contemple le paysage, qui se dénude petit à petit de son manteau blanc, je réussi encore à rêver comme un gosse...


Je sors péniblement de mon rêve, attiré par la réduction brutale du régime moteur, la main de mon instructeur tire la réchauffe et met en route la pompe électrique.
Il me regarde avec un sourire et je comprend directement qu'il s'agit d'une simulation de panne moteur.
J'affiche 145km/h, et je cherche un champ pour me poser. Virage à droite je m'aligne sur l'axe du champ et attend le signal pour remettre les gaz. Maintenant j'ai définitivement quitté mon état de léthargie. Plein gaz vers Auch.


La piste se profile à l'horizon et je m'annonce pour une reconnaissance verticale, le vent est quasiment inexistant, on choisira donc la 18 qui est la piste préférentielle, mon instructeur, me propose un exercice de PTE. On monte 2500 ft QNH et on débute l'exercice. j'affiche 150km/h et croise l'axe de piste vers la vent arrière et j'exécute toutes les procédures nécessaire pour la PTE.

Le plan à 6° est plutôt impressionnant et j'ai du mal à casser ma vitesse. Les roues touchent tant bien que mal la piste de Auch, tout le monde est sain et sauf. La PTE s'est bien passée. On remet les gaz et la rotation arrive vite. C'est partit pour les tours de piste. En cadeau la vidéo d'un approche sur Auch:




On s'arrêtera rapidement à Auch, juste le temps d'essayer les WC et de boire le café dans le restaurant réputé excellent de l'aérodrome qu'il est déjà l'heure de repartir vers LFCL car la nuit tombe.
Pour le retour, on fera un transit Sud dans la CTR de Toulouse, et en Anglais. La neige devient grise sous l'effet de la nuit et notre avion rentre petit à petit dans la pénombre, il est temps de rentrer.
On contacte le SIV pour transiter et une femme nous répond d'un anglais hésitant, et nous demande de rappeler à chaque points du transit.
Dernier point du transit sud et la fatigue se fait sentir, je lance un: "F-RK, vertical SL to quit the frequency". Va savoir qui des deux à l'anglais le plus hésitant...

LFCL est en auto-information, et on procède comme d'habitude, verticale terrain puis on intègre le circuit d'aérodrome. Toulouse a allumé ses lampes au sodium et une teinte orangée embellit la ville Rose.



Pour finir, je ne posterais que la vidéo de la finale sur la 34, et je vous dispenserais de mes vagues à l'âme dominicaux...
Et pour cause je suis en vacances, je ne retrouverais donc plus ma chaise de bois taguée avant 14 jours, et c'est tant mieux.




Cette semaine, je vais peut être sortir l'ULM avec le cousin, si la température augmente, car passer du DR-400 à l'ULM, c'est comme passer de l'avion à la chaise du lycée...

Espoir et désespoir.




"30 minutes sur les 3heures disponibles. 5 questions et une dissertation majeure à traiter. 4 questions de faites seulement.
L'espoir de la bonne note s'envole, tout comme les autres ce sont envolées. Aujourd'hui c'était Histoire/Géographie."

Ces quelques bribes de mots, recueillies à chaud après mon épreuve d'Histoire, sont les témoins mes vagues à l'âme.
La semaine le désespoir, le week-end l'espoir.

"Qu'ils en soient conscients ou non , les aviateurs volent toujours pour la splendeur des cieux."

Il est 20H31, depuis le temps, les cylindres du DR400 ont dû refroidir. Aujourd'hui, on a parcouru le ciel de Toulouse à Castelnaudary, en passant par Revel.

Le soleil jouait au jeu des lumières avec les nuages, gros et gris, teintant le cockpit tantôt de gris, tantôt de doré.
C'est juste pour ça que dans ta vie d'aviateur, tu sacrifieras tout ce que tu peux aimer. Juste pour émerveiller ton esprit d'un plaisir égoïste.
Certains ont tout perdu, y compris ce qui leur était le plus cher, juste pour ce plaisir: Voler!

Finale 29 LFMW, le traffic jaune canari qui nous précède, pose sur la piste sa trace de gomme et puis redécolle vers les cieux.
120 km/h, flaps full, on fait notre message radio. L'avion continu à descendre vers le plancher des vaches, l'arrondi et les pneus crissent sur le tarmac de Castelnaudary. Et puis plein gaz, comme si ta main, qui contrôle les gaz, contrôlait aussi ton plaisir égoïste. T'injectant alors à la façon d'un toxicomane des grosses doses de plaisir.

L'anglais qui nous accompagne sur ce vol, tiens le coup. Prenant des photos, pour oublier le fait qu'il est "Sick". Les sachets Egypt'air sont à porté de main.

"I have Controls and Communications, You have controls and communications"

La phrase du vol, celle ou pour prendre une photo, j'ai du donner les commandes à mon instructeur.
Son rictus, me montre que ma phrase est juste. C'est celle qu'il entend tout les jours au boulot, dans son simulateur A320.
Il a cette chance de se lever le matin pour monter dans un avion. Cette chance que je veux aller provoquer, soit en allant au Canada, soit en luttant pour avoir ma classe 1 en France. Une chose est sûre je l'aurai.

Il est 17H, en 29 minutes de vol, on est rentré de Castelnaudary, et le soleil croule sous le poids de la nuit.
Les explosions qui stimulent le moteur s'arrêtent, laissant juste percevoir le bruit de la pompe à dépression ( sûr ? ) . La verrière s'ouvre, laissant pénétrer le froid dans le cockpit, et marquant de ce fait la fin du vol et le retour de l'inexplicable sensation de la fin de vol, celle ou tu sais que demain tu auras le cul posé sur la chaise dure de ton lycée à écouter les autres débiter leurs lots de conneries monumentales.

Je ne fais plus rien, allant même jusqu'à sécher les cours.
Une amie à vue juste, en me disant que je ne pouvais pas toujours éviter ce que je n'aimais pas, et ce qui m'ennuyait. On va pousser jusqu'au bac. Le reussir avec succès et poursuivre sur la lancée.


Plus que 6 jours et 12H avant de s'aligner de nouveau sur la 34 de LFCL. Le temps va être long...